Jean TIROLE
Après des études brillantes à Nancy, il intègre l’École Polytechnique. Il s’y intéresse aux mathématiques. Mais c’est là qu’il découvre l’économie, à 21 ans, à partir de l’enseignement de Roger Guesnerie. Il explique bien sa passion : « J’ai vraiment été fasciné par cette discipline car elle est à la fois positive et normative : elle analyse les comportements pour établir des recommandations de politique économique, pour finalement essayer de rendre le monde meilleur. Pouvoir se confronter à des problèmes théoriques exigeants, et donc intellectuellement passionnants, tout en contribuant à la prise de décision, c’est très attirant ». En 1978, tout en intégrant le corps des ingénieurs des Pont et Chaussées, il présente son doctorat de 3e cycle en Mathématiques de la décision à l’Université de Paris IX – Dauphine, sous le titre « Essais sur le calcul économique public et le taux d’actualisation ». Puis il va préparer sa thèse en économie au Massachusetts Institute of Technology (MIT), sous la direction du futur Prix Nobel Eric Maskin. Il obtient son PhD en 1981 avec une thèse intitulée ; « Essays in Economic Theory ». Il décide de se consacrer à la recherche et revient en France en 1982, au Centre d’Etudes et de Recherches en Analyse socioéconomique (CERAS) de l’Ecole des Ponts et Chaussées où il rencontre un autre économiste français avec lequel il se lie d’amitié : Jean-Jacques Laffont.
Le M.I.T., qui s’est rendu compte de sa valeur, le rappelle aux Etats-Unis dès 1984. Il y est Professeur d’économie associé, puis titulaire de 1984 à 1992. Il aurait pu y faire toute sa carrière. D’ailleurs, il y séjourne aujourd’hui encore chaque été comme visiting Professor permanent pour y assurer un cours de doctorat. Mais en 1992, il prend une année sabbatique pour poursuivre avec Jean-Jacques Laffont une réflexion qui débouche sur un ouvrage : A Theory of Incentives in Regulation and Procurement. Son coauteur le convainc de participer à l’extraordinaire aventure dans laquelle il s’est engagé : créer à Toulouse un pôle universitaire de niveau international. Il lui confie la direction scientifique de l’Institut d’Economie Industrielle qu’il a mis en place au sein de l’Université de Toulouse I, notamment pour pouvoir rassembler des financements d’entreprises. Après la disparition prématurée de Jean-Jacques Laffont en 2004, Jean Tirole prend la responsabilité du pôle de recherches, qui est retenu comme l’un des treize réseaux thématiques de Recherche Avancée de notre pays. Il crée dans ce cadre Toulouse School of Economics (TSE) et assure son indépendance en organisant une partie de son financement sur la base d’un partenariat public/privé d’un type nouveau en France, avec des dotations de montants analogues apportées par l’Etat et quelques grandes entreprises. Comme dans les fondations américaines, ce ne sont pas les dotations elles-mêmes mais seulement leur revenu, qui peut être consommé chaque année : cela assure la pérennité du financement. TSEcompte aujourd’hui une centaine de chercheurs de diverses nationalités. C’est un centre de recherche d’excellence, qui forme avec la London School of Economics le duo de tête de la science économique en Europe, et qui est n°1 mondial en théorie des incitations. C’est une performance exceptionnelle dans notre pays, où la réflexion économique est si souvent affectée par des partis pris idéologiques.
Jean Tirole est un grand savant reconnu par ses pairs. Il collabore aux plus prestigieuses revues d’économie. Il a été rédacteur associé d’Econometrica, rédacteur associé de la Review of Economic Studies. Membre du Comité exécutif de l’Econometric Society de 1993 à 1999, il l’a présidée en 1998. Il a été membre de la Commission de Tarification de l’Électricité, et du Conseil d’Analyse économique. Il est encore aujourd’hui membre du Haut Conseil de la Science et de la Technologie, du European Research Council panel et du Comité de Suivi de la loi sur les libertés et responsabilités des universités.
Son œuvre est déjà considérable, tant par sa quantité que par sa portée. Il est l’auteur de 9 livres. Il a publié plus de 200 articles en français et en anglais, dont plus d’une trentaine sont parus dans les revues généralistes les plus renommées à l’échelle internationale. Il est l’un des économistes les plus cités au niveau mondial.