Du Souverain Juge au Juge souverain
Le philosophe Pierre Manent, connu pour ses réflexions sur "la Question des formes politiques", intitulé de son séminaire à l’École des Hautes Études en sciences sociales, s’interroge sur le processus "qui nous a fait passer d’un régime dans lequel le juge est subordonné au souverain politique, à un dispositif dans lequel le juge attire de plus en plus à lui la souveraineté". C’était le thème de sa communication, prononcée le 11 février 2008, devant les membres de l’Académie des sciences morales et politiques. Canal Académie vous propose d’écouter la retansmission de cette séance.
Pierre Manent a rappelé les principes qui président à l'élaboration de la notion de souveraineté et a voulu montré la profonde continuité étatique entre Ancien Régime et République en France, concernant la conception de la Loi.
«En s'élevant au-dessus de toutes les autres lois, la souveraineté ouvrait l'espace immense de la liberté des Modernes. Elle faisait advenir une possibilité inédite, gouverner les hommes en les laissant libres». La loi établit les conditions justes de l'action, selon ses propos et la construction étatique est l'expression d'une immense démarche abstraite. La nation et la souveraineté ont été discréditées au XX e siècle durant lequel le cadre de l'État-Nation s'est effondré au profit d'un cadre européen, en continuelle élaboration et d'une internationalisation du droit. L'universalisme des droits de l'homme a mis en place un droit qui organise "tout corps possible". C'est un droit indéfini Or il n'y a plus de corps, il n'y a plus d'intérieur. Il y a une règle de droit toujours applicable. Le droit ne s'appuie plus sur aucune communauté réelle, si bien que «le droit est suspendu au seul juge». L'idéologie des droits de l'homme actuelle rassemble des règles de sources divergentes. La tentation est grande d'homogénéiser les règles de droit sous le couvert des droits de l'homme.
Pour en savoir plus
- Texte de sa communication