« L’intérêt national »
Spécialiste reconnu des relations internationales, Thierry de Montbrial fait le constat qu’à rebours d’une longue tradition inaugurée par Richelieu et portée en particulier au XXe siècle par le général de Gaulle, l’intérêt national est victime en France, depuis une dizaine d’années, d’une « étrange ellipse ». Certes, les présidents continuent de se référer à des « intérêts vitaux », mais ils ont tendance à les confondre plus ou moins avec le statut de puissance nucléaire. Les autres dimensions de l’intérêt national sont tues, dissoutes dans la notion plus vague d’influence globale, quand elles ne sont pas niées. Pour l’orateur, le temps est donc venu d’une refondation de la politique extérieure française autour d’une conception renouvelée de l’intérêt national. Pour lui, loin de se limiter aux seules sphères économiques ou stratégiques, celui-ci doit être appréhendé comme un « bien public » dont la définition requiert l’engagement de toutes les forces de la nation car, comme l’avait bien perçu Samuel Huntington, « nous devons savoir qui nous sommes, avant de pouvoir savoir quels sont nos intérêts ».