La Dame du Palatin, un roman de Patrick de Carolis : La belle Arlésienne épargnée par Néron
Tacite, Boccace, Montaigne ont encensé, en leur temps, Paulina Pompeius cette « jeune et très noble dame romaine qui avait épousé Sénèque ». Patrick de Carolis, journaliste et écrivain, membre de l’Académie des beaux-arts, a salué, à son tour, cette héroïne dans son dernier roman historique La Dame du Palatin. Il évoque au micro d’Anne Jouffroy son coup de cœur pour cette jeune fille de Provence, entraînée malgré elle dans les intrigues sanglantes de la Rome impériale de Claude, d’Agrippine et de Néron.
_ Naître en Arelate (en Arles), en 26 après J.C, et devenir la femme d’un des hommes les plus célèbres de l’Antiquité, c’est la destinée étonnante que connut Paulina, fille d’un riche négociant et armateur gallo-romain, en épousant Sénèque, écrivain, philosophe, précepteur et conseiller de Néron.
Arelate et Jules César
Arles, région d’étangs et port fluvial, était spécialisée dans la construction de bateaux à fonds plats. Jules César, au moment de son combat qui l’opposait à Pompée à Marseille, eut besoin de bateaux à fonds plats. Il fit appel aux armateurs arlésiens ; le grand-père de Paulina, entre autres, prit fait et cause pour César – après quelques hésitations toutefois. Jules César remercia, d’une part, les familles qui le servirent et, d’autre part, la cité, elle-même. Il fit de cette ville la 6ème Colonie romaine et il offrit aux Arlésiens des aqueducs, des arcs de triomphe et un des premiers théâtres en pierre hors de Rome.
C’est à César qu’Arles doit d’être la plus grande commune (en superficie) de la France du XXIe siècle.
Provincia gallo-romaine, terre de métissage
Le roman commence, en Arelate, au temps de l’Empereur Claude (41-54). Les racines gauloises sont très vivantes dans cette province romaine. Patrick de Carolis dessine le portait de l’époque gallo-romaine déchirée entre sa répulsion et son attraction pour Rome, la puissance dominatrice (clivages récurrents dans tous les pays dominés, à toutes les époques).
La Provence est une terre ouverte aux courants de civilisation. Marins, militaires apportent de nouvelles religions : les cultes de Mithra, d’Isis et bientôt la secte de Christos. Arles est un des berceaux du christianisme en France.
La tante et la mère de Paulina symbolisent le respect des traditions sociales et religieuses de la Gaule du premier siècle de notre ère. Le père, Paulinus Pompeius, dont les bateaux sillonnent la Méditerranée, devient préfet de l’Annone à Rome. Le mirage romain l’aspire pour un temps. Puis il rentre en Arelate, fatigué des compromissions que la cour impériale lui impose. Son gendre, Sénèque lui avait dit : « Personne ne te restituera tes années perdues, personne ne te rendra à toi-même sinon toi. Pour rentrer paisiblement au port, n’attends pas que toute ta vie ait essuyé la tempête… »
Paulina, Sénèque et Néron
Patrick de Carolis précise qu’il n’a pris aucune liberté avec la vérité historique. « Tous mes romans historiques sont bâtis, dit-il, avec une exigence absolue des dates et des faits historiques. Après, comme le restaurateur d’un tableau quand il y a des manques, je l’habille. Je donne chair, corps, à l’événement historique bien connu.
Pourquoi Sénèque, homme de cinquante ans vivant sur le Palatin, a épousé en seconde noce une jeune arlésienne ? La rencontre entre Paulina et Sénèque a eu lieu, c’est avéré. Mais aucun historien ne peut nous dire “où et comment” elle a eu lieu. J‘ai essayé de créer une rencontre vraisemblable, naturelle.
Pourquoi Néron épargne-t-il Paulina ? Personne ne sait. Pour éviter de me tromper, de distordre l’Histoire avec une interprétation intellectuelle ou philosophique erronée, j‘ai choisi de laisser la place au romantisme, au romanesque.
Par ailleurs, je suis très touché par la modernité de Sénèque, par ses déchirements entre sagesse et ambition personnelle. Il veut être le sage qui maîtrise sa raison mais, en même temps, il prend plaisir à être le conseiller de l’empereur. Le goût du pouvoir est toujours là ! C’est pour ça que j’ai fait intervenir saint Paul, le messager de la religion de l’amour, plus fort que celui de la religion de la raison. C’est pour ça, aussi, que j’admire tant les femmes qui, en général (oublions Agrippine !) sont plus sincères, plus convaincues, que les hommes. Leur fidélité a un idéal, leur “non-renoncement”, leur “non-reniement” me touchent beaucoup. Paulina Pompeius, la Dame du Palatin, en est un superbe exemple. »
Retrouvez Patrick de Carolis, pour son installation sous la Coupole le 12 octobre 2011 au fauteuil d’André Bettencourt
En savoir plus :
- Consultez la fiche de Patrick de Carolis sur le site de l'Académie des beaux-arts.