La désinformation par les mots (2/2)
Popularisé en France par feu Vladimir Volkoff, le mot « désinformation », né en Russie, respire le parfum suranné de la guerre froide, lorsque les maîtres de l’espionnage soviétique jouaient aux échecs avec le monde libre. Mais en dépit des efforts tous azimuts déployés par Moscou, l’avenir montra que les sociétés ouvertes triomphent toujours des sociétés fermées. Cette émission est la seconde d’une série de deux.
_ La supériorité de la démocratie ne réside pas seulement dans un pouvoir politique légitime mais dans la multiplicité et la vitalité des forces qui la composent et qui, s’opposant les unes aux autres, donnent vie à un système complexe où tout est possible.
A l’inverse, la faiblesse de la dictature tient au caractère unique du pouvoir qui, pour se maintenir, est constamment obligé de réprimer des individus dont elle ne peut même pas chercher le consentement. La propagande sévit dans les sociétés fermées et brutales. Aux sociétés ouvertes et complexes, « on » applique la désinformation. Volkoff la définissait ainsi : « Manipulation de l’opinion publique à des fins politiques par des moyens détournés de traitement d’une information véridique ou non ». L’intoxication des masses n’a pas disparu avec l’écroulement de l’empire rouge.
Bien au contraire. La source a changé mais la guerre des mots se répand d’autant plus vite que les media comme Internet rendent l’espace public accessible à tous et font tomber les barrières entre les hommes. Les mots font alors l’objet d’une surchauffe sémantique car tous les rapports de forces reposent sur le sens qu’on leur donne. La politique est bien la définition symbolique de la réalité.
Maurice Pergnier se livre à une réflexion aussi cruelle que pertinente sur l’usage admis de certains vocables, « une fois ces derniers passés à la moulinette du politiquement correct ». Qu’il s’agisse des « banlieues », des guerres du golfe ou du conflit dans les Balkans, la Désinformation par les mots (aux Editions du Rocher) dresse un inventaire parfois truculent des ambiguïtés, des euphémismes – en réalité des mensonges – qui opacifient le discours pour mieux caricaturer la réalité.
Maurice PERGNIER est linguiste, sémiologue et écrivain. Il est professeur émérite de linguistique générale à l’université Paris XII. Il a publié « La résurrection de Jésus de Nazareth » et « La désinformation par les mots » aux éditions du Rocher.
Pour écouter la première partie de cette émission, cliquez ici : La désinformation par les mots (1/2)