Qu’est-ce que l’homme ?

Entretien avec Chantal Delsol, membre de l’Académie des sciences morales et politiques
Chantal DELSOL
Avec Chantal DELSOL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Le livre Qu’est-ce que l’homme ? de la philosophe Chantal Delsol tente d’éclaircir la question humaine. Mortalité, société, éthique, enracinement, émancipation... autant de thèmes qui permettent de mieux comprendre la question de l’homme. Entretien avec l’académicienne des sciences morales et politiques.

_ L'homme, inépuisable sujet, se trouve ici revu de manière plus moderne, sous forme de cours anthropologique. À partir de la première œuvre de littérature (qui remonte à -2650 ans avant J.-C.) jusqu'à nos jours, Chantal Delsol retrace les grandes lignes directrices qui fondent le caractère humain à travers six thèmes :

- La mortalité et la différenciation,
- Une société immortelle,
- Ethique : l'intuition universelle de la norme,
- La transmission,
- La relation et la distance,
- L'enracinement et l'émancipation.

«L'homme se définit par sa condition même de mortel et sa lutte contre la mort. Sa propre fin, c'est le thème récurrent de sa vie, de sa peur ou de son bonheur.» En citant Socrate ou Aristote, Chantal Delsol nous livre les grandes interrogations de l'homme sur l'homme, et ceci depuis la nuit des temps. Ainsi, la peur de la mort est un thème régulier de nos sociétés humaines. Comment vaincre la mort, cet irrémédiable moment, signe de la fin de l'humanité ? En se perpétuant et en renouvelant les sociétés ! Le parallèle entre la mort chez l'homme et la mort dans la société s'avère être un point central car le besoin de se renouveler pour créer l'immortalité reste fondamental. «Le souci de la mort vaut aussi pour les sociétés et une société ne peut durer que par le souci des individus de laisser derrière eux d'autres êtres». La peur de la mort se trouve adoucie par les religions qui aident à rassurer les mortels.

Comment fonctionne l'homme ? À cette question, les chapitres sur la transmission, la relation et la distance ou encore l'enracinement et l'émancipation tentent de répondre. Pour Chantal Delsol, il n'y a aucun doute, le fondement même de l'homme s'exerce dans l'acte du don et celui de la dette car ils créent le lien. Elle n'est pas la première à l'observer. Pour appuyer sa thèse, elle reprend une citation du célèbre anthropologue Marcel Mauss : «Il est de la nature de la nourriture d'être partagée. Ne pas en faire part à autrui c'est tuer son essence, c'est la détruire pour soi et pour les autres». L'homme ne serait rien sans autrui. Seul, qu'adviendrait-il ? Pour se faire, les actions de transmettre et de communiquer restent essentielles. Comment pourrait-il laisser une trace ? Quel serait le but de sa vie ?

L'homme, au delà de tout, doit se développer personnellement, fidèlement à son moi profond, tout en restant ancré dans ses racines. C'est cette dichotomie paradoxale qu'il faut comprendre comme une aventure profondément constitutive de l'homme. La volonté de s'arracher de sa condition fait partie de la condition humaine. L'émancipation signifie aussi la recherche d'un enracinement, certes adapté, mais ancré dans un destin anthropologique et culturel.

Interrogatif, humain et sensible, ainsi se veut ce livre paru en 2008 aux éditions du Cerf.

Chantal Delsol, membre de l’Institut



Chantal Delsol est membre de l’Académie des sciences morales et politiques depuis le 18 juin 2007, élue au fauteuil précédemment occupé par Roger Arnaldez. Elle est philosophe, professeur et auteur de multiples ouvrages savants sur la politique, la justice, la République, l’Europe, la démocratie, bref sur tous les domaines qui se croisent au carrefour de la philosophie, des sciences politiques et de la sociologie des mentalités.

En savoir plus :



Chantal Delsol à l'Académie des Sciences morales et politiques

[Retrouvez une autre émission avec Chantal Delsol consacrée à son roman L'expédition Janus->http://www.canalacademie.com/L-expedition-Janus-en-Amazonie.html]

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