Fauves et Expressionnistes au musée Marmottan Monet
Le musée Marmottan Monet à Paris, haut lieu de l’impressionnisme, expose une cinquantaine de chefs d’œuvre du musée Von der Heydt de Wuppertal en Allemagne, dans le cadre de l’exposition : Fauves et Expressionnistes de Van Dongen à Otto Dix. Quelles différences et quels parallèles entre ces précurseurs, grandes figures indépendantes de l’art ? Gerhard Finck, commissaire de l’exposition et Jacques Taddei, membre de l’Académie des beaux-arts s’expriment, au cours de cet entretien, sur cette confrontation aux sources d’un art moderne.
À la demande du musée Marmottan Monet, le musée Von der Heydt a sélectionné ses plus beaux chefs-d'œuvre pour cette exposition qui offre un panorama de l'art moderne. Cet échange croisé entre les deux musées permet aux visiteurs de découvrir les éléments forts des collections expressionnistes d'Allemagne et d'Autriche allant de la période d'avant la Première Guerre mondiale, à celle de la Nouvelle Objectivité. Réciproquement, les visiteurs à Wuppertal peuvent venir admirer des œuvres phares impressionnistes des collections du musée Marmottan, d'autant que Monet avait attiré l'attention en Allemagne dès le début du XXe siècle.
Les Expressionnistes allemands sont exposés aux côtés de certaines œuvres des Fauves français, Vlaminck, Dufy, Braque et Van Dongen mais aussi au sein de quelques toiles représentatives de l'expressionnisme autrichien de Kokoschka et Oppenheimer. Plusieurs courants artistiques sont ici confrontés : fauvisme, expressionnisme de la première et deuxième génération et la démarche singulière d'un Kandinsky qu'on peut situer entre les deux.
En 1900, l'empereur Guillaume voit dans l'art dit "moderne" "un art de caniveau". En 1905, quatre étudiants en architecture désireux de se libérer des conventions et de l'académisme d'un Adoph von Menzel, fondent un groupe d'artistes appelés Le Pont, Die Brücke. Quatre audacieux qui s'appellent Fritz Bleyl, Erich Heckel, Ernst Ludwig Kirchner et Karl Schmidt-Rottluf, se retrouvent à Dresde, où ils élaborent un programme de rupture avec le passé, préconisant de renouer avec un espace de valeurs authentiquement humaines : un monde vu et vécu loin des académismes. Admirateurs fervents de Gauguin et de Van Gogh, de Munch, et des arts premiers, ils s'emparent de l'énergie du trait et des expressions de ces grandes figures de l'art, pour transmettre la violence des sentiments. D'autres les rejoignent, Emil Nolde, Max Pechstein. Ils tiennent leur première exposition en 1905, d'autres succèdent en 1906, en 1908, mais leur appartenance demeure factice et liée aux circonstances des expositions. Des dissensions fortes entre les membres font éclater le groupe entre Berlin et Dresde.
En 1911, lors de la première exposition du groupe baptisé Blaue Reiter ("Cavalier bleu", créé en 1909), les contacts avec le groupe Die Brücke n'existaient pas encore. Parmi eux, Kandinsky, Jawlensky, Marc, Macke et Münter. L'année suivante naissaient des échanges pour fédérer ces mouvances partageant les mêmes aspirations : une effervescence de confrontation et de communion d'après Lionel Richard, avec Berlin pour carrefour de toutes les avant-gardes.
Le choc de la Première Guerre mondiale les ébranle et apporte son lot de désillusions révélant une nouvelle génération parmi les Expressionnistes.
Ces groupes portent bien les stigmates de la crise de civilisation que traverse l'Allemagne et le reste de l'Europe après la Première Guerre mondiale et qui se manifeste dans ce qu'on a appelé l'expressionnisme jusqu'en 1920. Comme le dit Lionel Richard dans le catalogue de l'exposition : l'appel des Expressionnistes à un "Homme Nouveau", s'achève dans la dérision. Le tableau d'Otto Dix, À la beauté met en scène cette ironie violente, une réalité sociale et la blessure de la guerre. Avec Beckmann et quelques autres, ils figurent en 1925, dans une exposition à Mannheim, intitulée La Nouvelle Objectivité.
Entre les Fauves français et ces Expressionnistes allemands d'avant guerre, le peintre Kandinsky trouve un langage propre. Passé presque inaperçu au sein du monde de l'art à Paris, en 1906 lors de son séjour en France, il y a découvert le fauvisme. De retour en Allemagne, il retrouve les Expressionnistes du groupe Die Brücke ("Le Pont"). Il s'inspire probablement de ce qu'il a rencontré à Paris et donne dans ses œuvres une profonde autonomie à la couleur, accompagnée d'un sens accru de la composition, dans laquelle un élément donne plus que d'autres, "la sonorité dominante" de l'œuvre.
En savoir plus
- Musée Marmottan-Monet, informations pratiques et collections
- Le musée est ouvert tous les jours, de 11 h à 18 h , fermé le lundi.
- Nocturne le mardi jusqu'à 21h .
- Fermeture les lundis et le 1er janvier, le 1er mai et le 25 décembre.
- Exposition Fauves et Expressionnistes. De Van Dongen à Otto Dix , du 28 octobre 2009 au 20 février 2010, au musée Marmottan Monet
- Musée Von der Heydt de Wuppertal
- Jacques Taddei de l'Académie des beaux-arts, directeur du musée Marmottan Monet
- Gerhard Finck, commissaire de l'exposition et directeur du musée Von der Heydt
Livre
- Catalogue de l'exposition :
- Christine Poullain, Michel Draguet, Lionel Richard, Fauves et Expressionnistes de Van Dongen à Otto DIx, Chefs-d'œuvre du musée Von der Heydt , Édition Hazan, Paris, 2009