Juan Gris, peintre cubiste entre Braque et Picasso
Le monde dont je tire les éléments de la réalité n’est pas visuel mais imaginatif disait Juan Gris. Comment comprendre l’œuvre brève de cet artiste fauché par la mort à quarante ans en 1927 ? Juan Gris cherchait la vérité interrogeant les formes et les couleurs au sein du mouvement cubiste, dans ce qu’il nommait lui-même les rimes plastiques. Quelques explications avec Maïthé Vallès-Bled, Conservateur en chef du Patrimoine, interrogée au musée Paul Valéry de Sète, par Marianne-Durand Lacaze.
Considéré généralement comme faisant parti du cercle premier des peintres cubistes, Juan Gris en est acteur, théoricien et héritier. Maïthé Vallès-bled, Conservateur en chef du Patrimoine et directrice du musée Paul Valéry de Sète, présente l'exposition Juan Gris, rimes de la forme et de la couleur ouverte au public jusqu'au 31 octobre 2011.
Par cette exposition, elle souhaite montrer la synthèse picturale que le peintre a élaborée du cubisme initié par Braque et Picasso, peintres qu'il a silencieusement accompagnés au début du cubisme. Puis osant très vite la couleur et le dialogue des formes dans ses compositions, Juan Gris a trouvé sa voie entre ces deux monstres sacrés de l'art moderne qu'il considérait comme ses maîtres et qui ont vu en lui un grand peintre.
De quelles ruses graphiques a-t-il joué dans le processus de déconstruction bien connu du cubisme sur un même objet ou même plusieurs dans la même toile ? Mort prématurément, à quarante ans, en 1927, il a laissé une œuvre originale où les formes peintes au cœur de ses toiles se répondent par des rimes subtiles qui soulignent les ressemblances entre deux objets, entre des éléments de paysage, ou de nature morte ou bien encore, des éléments de portrait. C’est à ces échos, à ces rimes que l’exposition du musée Paul Valéry de Sète a voulu rendre hommage.
Au tournant des années vingt, le cubisme en tant qu’avant-garde s’essouffle. Commence alors une période qu’on distinguait à l’époque du nom de » cubisme synthétique » par rapport au « cubisme analytique », celui des maîtres. C’est alors qu’on fit de Juan gris le représentant et le théoricien de ce second volet du cubisme.
Seule, l’intéresse la vérité. Le tableau est pour lui selon ses mots « une architecture plate et colorée » qui lui permet de créer de nouvelles lois de composition.
Dans cette émission, Maïthé Vallès-Bled, commissaire général de l’exposition, nous fait entrer dans l'originalité de l'œuvre de Juan Gris, évoquant «le sublime familier» des natures mortes du peintre, si bien nommé par Maurice Raynal, son contemporain. Elle évoque le tableau Vue sur la baie (1921), pour nous parler des rimes de la forme et de la couleur chères à Juan Gris, mort trop jeune et dont Picasso disait : « C’est beau un peintre qui sait ce qu’il fait ! »
Juan Gris (1887-1927), peintre espagnol, a pratiqué le dessin de presse avant de connaître à Paris, l'atelier de Picasso du Bateau Lavoir à partir de 1906, où il a vu naître Les Demoiselles d'Avignon. La synthèse qu'il fait du cubisme par l'éclatement de la couleur, la respiration de l'espace et l'intellectualisation de sa démarche l'ont conduit à privilégier la nature- morte à ses débuts cubistes. La mise en scène des objets, pour la composition, répondait pour lui au désir qu'il avait de toucher la chose et non seulement de la voir. Ami de nombreux poètes et écrivains il fut celui de Modigliani, Matisse, Fernand Léger. Outre ses paysages et ses portraits, il a laissé des dessins dont quelques uns sont présentés ainsi que quelques photos.
Pour en savoir plus
- Musée Paul Valéry
- catalogue d'exposition