La berline de l’Empereur et la mystérieuse histoire du butin de Waterloo

A l’occasion de l’exposition La berline de Napoléon au musée de la Légion d’honneur, Anne de Chefdebien et Thierry Lentz présentent ces trésors retrouvés.
Avec Laëtitia de Witt
journaliste

Près de deux siècles après Waterloo et la chute de Napoléon, la berline de l’Empereur et une partie du butin conquis par les Prussiens, sont pour la première fois présentés à Paris pour une exposition exceptionnelle au Musée de la Légion d’honneur jusqu’au 8 juillet 2012. L’événement s’accompagne d’un catalogue dont la direction a été confiée à Jean Tulard, de l’Institut. Anne de Chefdebien et Thierry Lentz, qui ont participé au catalogue, reviennent sur cette prise rocambolesque et ses trésors.

Émission proposée par : Laëtitia de Witt
Référence : carr875
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- Waterloo, 18 juin 1815. N’est-ce pas la bataille de Napoléon la plus fascinante ? Est-ce parce que c’est la dernière ? Est-ce parce que les romantiques mais aussi les vainqueurs la glorifièrent ? Il faut dire qu’ils obtenaient enfin leur revanche sur le souverain qui les avait tenus en échec. Au soir de la bataille, il ne leur manquait finalement que Napoléon. N’ayant pas capturé l’Empereur, les prussiens accordèrent une dimension particulière au pillage de ses effets personnels, et firent grand cas de la prise de sa voiture.

- En effet, dans le chaos de la défaite, les Prussiens réussirent à s'emparer de deux voitures personnelles de Napoléon : une grosse berline où l'Empereur pouvait dormir, se restaurer et travailler pendant les longs trajets ; un landau en berline, plus léger, construit en 1812 et utilisé par Napoléon pendant la campagne de Russie.

- Dans la dormeuse, les soldats prussiens découvrirent vaisselle, linge de corps et de toilette, nécessaire dentaire, armes, pièces d'or, bijoux et pierres précieuses. Il s’agit de la part rémunératrice du butin, la part symbolique se trouvait vraisemblablement dans le landau et dans la voiture de Marchand. Parmi les pièces significatives figurent le manteau, l’épée, le chapeau et les décorations de Napoléon Ier. Étaient réunis, entre autres, le grand-aigle de la Légion d'honneur -ordre créé en 1802 par Bonaparte, Premier consul - l'Aigle noir de Prusse, la Toison d'or d'Espagne, les insignes de l'ordre des Séraphins de Suède...


Des pièces données, perdues, retrouvées, cachées...

- Le destin de ces différents objets après 1815 fut mouvementé.
La dormeuse fut d'abord emmenée en Allemagne, puis en Angleterre où elle disparut en mars 1925 dans l'incendie du musée Tussaud de Londres. La redingote grise, un chapeau et une épée de Napoléon furent emportés par des officiers prussiens et se retrouvèrent dans des collections privées puis dans des musées allemands.

- Contrairement à la légende entretenue par les Prussiens, cette redingote, ce chapeau et cette épée n'étaient pas ceux reellement portés par Napoléon à Waterloo. Précisons toutefois que le chapeau porté par Napoléon le jour de la bataille a été retrouvé. Rentré à Paris après la bataille, Napoléon le fit porter chez son chapelier, Poupard, pour qu’il soit nettoyé et remis en forme. La suite des événements ne lui permit pas de le récupérer. Il resta chez le chapelier dont la petite-fille l’offrit au général Duchesne, sénonais, qui, à sa mort, le légua au musée de Sens. Il s’y trouve toujours.
- Quant à l'élégant landau, avec sa caisse rouge foncé et sa portière aux armes de l'Empire, il fut offert au feld-maréchal Blücher et restera dans sa famille jusqu'en 1973, date à laquelle un de ses descendants la remet au musée de Malmaison.
- Pour ce qui est des décorations, elles furent transmises en 1816 au roi de Prusse et furent exposées à Berlin jusqu’à la Première Guerre Mondiale. Cachées dans un premier temps, elles réapparaissent en 1934 au musée de l'Arsenal à Berlin. Protégées dans un bunker du zoo de Berlin pendant la Seconde Guerre mondiale, elles sont emportées en 1946 dans les fourgons de l'Armée Rouge à Moscou. Elles feront désormais partie des collections du musée historique d'Etat à Moscou. C’est une exposition en 2000 dans ce même musée sur « Alexandre Ier et Napoléon Ier » qui atteste de leur présence. Sorties exceptionnellement pour être exposées au musée de la Légion d'honneur, elles regagneront le musée russe qui prévoit d'ouvrir en 2013 une aile spéciale consacrée aux souvenirs napoléoniens.

Informations pratiques :

L’exposition La berline de Napoléon, le mystère du butin de Waterloo se tient au musée de la Légion d’Honneur du 7 mars au 8 juillet 2012.

Le public pourra découvrir la voiture de l’Empereur pillée au soir de l’ultime défaite et le butin reconstitué : les effets de campagne de Napoléon (chapeau, redingote, nécessaires, argenterie…), mais surtout, pour la première fois exposées en France, ses décorations personnelles, prêtées de façon exceptionnelle par le musée historique d’État de Moscou.
Ces objets auront voyagé en Europe au gré des événements historiques, de Waterloo en 1815 à Moscou à la fin de la Seconde Guerre mondiale - et aujourd’hui à Paris. L’aventure rocambolesque de ce butin alimente la légende napoléonienne depuis près de deux siècles…

- Musée national de la Légion d’honneur et des Ordres de chevalerie
2, rue de la Légion d’honneur (parvis du musée d’Orsay)
75007 Paris
Tél : 01 40 62 84 25
Fax : 01 40 62 84 96
Site internet : www.musee-legiondhonneur.fr

Horaires
- Du mercredi au dimanche de 13h à 18h , mardi réservé aux groupes sur réservation. Fermé les lundis, 1er janvier, 1er mai, 15 août, 1er novembre et 25 décembre.

Tarif
- Entrée et audioguide gratuits

Nos invités :
- Anne de Chefdebien, conservateur du musée de la Légion d’Honneur
Thierry Lentz, directeur de la Fondation Napoléon, spécialiste de la période napoléonienne.



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