Paul Jouve à la Maison de Balzac
Paul Jouve et Honoré de Balzac : la rencontre entre le peintre animalier et le romancier s’est faite par l’intermédiaire d’un livre, en 1949. Cette année-là est éditée une version luxueuse d’"Une passion dans le désert", un texte de Balzac, illustré par Paul Jouve. La Maison de Balzac présente une très belle exposition, où se répondent dessins, sculptures, gravures et littérature.
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«C'était une femelle. La fourrure du ventre et des cuisses étincelait de blancheur. Plusieurs petites taches, semblables à du velours, formaient de jolis bracelets autour des pattes. La queue musculeuse était également blanche, mais terminée par des anneaux noirs. Le dessus de la robe, jaune comme de l'or mat, mais bien lisse et doux, portait ces mouchetures caractéristiques, nuancées en forme de roses, qui servent à distinguer les panthères des autres espèces de felins.
En ce moment, la panthère retourna la tête vers le Français, et le regarda fixement sans avancer. La rigidité de ces yeux métalliques et leur insupportable clarté firent tressaillir le Pronvençal, surtout quand la bête marcha vers lui ; mais il la contempla d'un air caressant»
Honoré de Balzac, Une passion dans le désert
C'est un texte très peu connu de Balzac qui a été illustré en 1949 sous forme d'un ouvrage d'art luxueux. Une passion dans le désert est une nouvelle courte, racontant une histoire d'amour inhabituelle et audacieuse entre une panthère et un soldat de l'armée napoléonienne. Les illustrations ont été confiées à Paul Jouve pour son art de donner vie aux fauves sous forme de peintures, de sculptures, de mosaïques et de gravures.
L'édition de 1949 d'Une passion dans le désert est un des projets d'ouvrages d'art, tels qu'il en existait dans l'entre-deux-guerres : un tirage très limité, une finition extrêmement précise, et l'utilisation de matières rares (parchemin, dorure, etc.). Il s'agit d'un des derniers "beaux livres" de cette période. La bibliographie de luxe est touchée de plein fouet par la Seconde Guerre mondiale, et ne lancera que de rares projets après 1945.
Paul Jouve s'est beaucoup investi dans cet ouvrage : il s'attache à dessiner une ornementation riche, inspirée de l'art égyptien. La commande l'oblige à représenter des hyènes en cage, des poules, et des hommes, ce qu'il n'est pas habitué à faire.
Paul Jouve avait auparavant participé à d'autres ouvrages d'art, présentés également à la Maison de Balzac, notamment Le livre de la jungle (1919) et La chasse de Kaa (1930), deux textes de Rudyard Kipling, ainsi que Paradis terrestres (1932) de Colette.
L'émission propose un tour de l'exposition à la Maison de Balzac, en compagnie du commissaire de l'exposition, Yves Gagneux, Conservateur en chef et directeur de la Maison de Balzac.
A propos de Paul Jouve (1878-1973)
Dès sa formation, Paul Jouve se passionne pour les animaux. Il fréquente la ménagerie du Jardin des plantes et les salles du Muséum d'histoire naturelle. Sa réputation d'artiste animalier s'affirme très tôt : il participe à l'élaboration de la porte monumentale marquant l'entrée de l'Exposition universelle de 1900.
Jouve travaille la sculpture, la lithographie, la peinture, le dessin. Après la Première Guerre mondiale, il accentue l'aspect décoratif de son œuvre, et épure ses dessins. Néanmoins, ses dessins de fauves gardent une fabuleuse précision anatomique, et semblent toujours apaisés et tranquilles.
Paul Jouve (de son nom complet Pierre-Paul Jouve) est élu à l'Académie des beaux-arts en 1945.
Aller plus loin
- Paul Jouve sur le site de l'Académie des beaux-arts
- La Maison de Balzac
L'exposition "Une passion dans le désert, de Balzac à Paul Jouve" est ouverte jusqu'au 6 janvier 2008 à la Maison de Balzac, 47 rue Raynouard, 75016 Paris. Tél : 01 55 74 41 80.