L’Europe fait-elle fausse route ? Comment la croissance peut-elle revenir ?
Pour envisager l’avenir, n’a-t-on rien retenu des leçons des catastrophes financières passées ? Telle est la question sous-jacente que pose Jean-Louis Chambon à ses deux invités : Pierre Sabatier et François Meunier, économistes et membres du Cercle Turgot.
Le contraste entre les politiques en Europe est devenu patent.
- D'un côté : rigueur budgétaire appliquée au pays les plus fragiles de l'Europe, à laquelle s’ajoutent de profondes réformes structurelles (marché du travail poids de la dépense publique, retraite) engagées par les «vieilles nations» pour retrouver leur compétitivité, à l’exemple de l'Italie et de l'Espagne aujourd'hui et de l'Allemagne hier.
- De l'autre, la résistance de la France qui s'arcboute sur un modèle très contesté par ses partenaires où la dépense publique stimule la demande intérieure et entretient des déséquilibres des échanges colossaux.
Pour Pierre Sabatier, président de Primeview, la logique de la rigueur ne fonctionne pas : «les déficits se réduisent très peu et la dette publique continue de croître». Certes, selon la théorie ricardienne (de David Ricardo) dite de l'équivalence, la réduction des déficits publics devrait entraîner un comportement de «désépargne» des agents privés se traduisant par plus de consommation et / ou d'investissement de leur part mais dans les faits, la hausse de l'épargne publique s'accompagne de celle du privé dans une logique de précaution, mettant à mal cette théorie et créant l'impasse dans laquelle est semble-t-il engagée l'Europe.
D'ailleurs les Etats-Unis diffèrent les actions visant à réduire leur déficit et leur dette publique à l'achèvement d'un cycle de désendettement de leurs ménages et agents privés. Auraient-ils mieux compris les mécanismes de l'économie contemporaine ?
La France pour sa part reste persuadée que «la croissance doit revenir», ce que traduisent ses hypothèses en la matière considérées comme très optimistes par nombre d'observateurs.
Elle paraît vouloir accompagner ses avancées sur un chemin qui la conduirait vers plus de social : une sorte de démocratie où l'Etat contrôlerait plus. En témoigne son leadership qu'elle entend conduire sur le contrôle et la pénalisation fiscale des banques, avec comme fer de lance la création d'une BPI (Banque Publique d'Investissement) censée se substituer à une frilosité bancaire dénoncée et pourtant complétement absente des réalités opérationnelles.
Les banques françaises ayant été les seules en Europe à avoir fait progresser leur encours de crédits à l'économie pendant la période de crise plus rapidement que la croissance nationale.
Dans ce contexte se pose la question de l'opportunité d’une telle initiative. Avait-t-on besoin d'un nouvel instrument ? Si ce n'est pour satisfaire des promesses électorales, alors qu'Oseo et les banques privées répondent à la demande solvable ?
N'a-t-on rien retenu des leçons de la catastrophe financière de l'expérience similaire du Crédit lyonnais ?