Perspective des prix de l’immobilier en France : vers une baisse massive ?
Jean-Louis Chambon reçoit Pierre Sabatier, administrateur du Cercle Turgot, auteur, chroniqueur et président du cabinet de recherches économiques Primeview, venu évoquer un thème souvent passé sous silence lors de la campagne présidentielle de 2012 : l’immobilier et la dégradation de son marché. L’occasion pour notre invité et notre chroniqueur Jean-Louis Chambon de nous éclairer sur un sujet des plus complexes.
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Dans son rapport récent et particulièrement remarqué, Pierre Sabatier et son associé, Jean-Luc Buchalet, jettent un regard inquiet sur les perspectives des prix de l’immobilier en France.
En effet, bénéficiant d’une évolution plus forte que la moyenne des pays européens de ses prix de l’immobilier, la France pourrait rencontrer prochainement de violents vents contraires susceptibles de remettre en cause sa situation privilégiée.
Jean-Louis Chambon revient avec son invité sur les éléments clés de cette analyse :
- Tout d’abord, les fondamentaux, les revenus des ménages qui stagnent, et l’inflation qui progresse, laissent à penser que s’est constituée une bulle de valorisation sur le secteur immobilier à son apogée à l’été 2011. Le mouvement à la baisse qui se dessine paraît se heurter à l’incrédulité et au déni des observateurs et des acteurs : il pourrait être massif sur les cinq à dix prochaines années.
- En effet la disparition des principaux leviers ayant permis la hausse va entraîner une correction forte, durable et généralisée des prix et en particulier :
o L’évolution défavorable de la demande : les vendeurs nets (c’est-à-dire les plus de 60 ans) seront très largement en progression et le rapport de force s’inversera au profit des acheteurs potentiels pesant à la baisse sur les prix,
o Les tendances démographiques moins porteuses (le vieillissement de la population) altèrent le désir d’achat,
o Une capacité d’emprunt en fort recul à la fois en raison du pouvoir d’achat et du contexte de l’emploi mais aussi des exigences règlementaires imposées aux banques qui réduiront les durées de financement et élèveront le niveau de l’apport personnel,
o Le risque d’une forme de désengagement de l’État à travers les contraintes de la fiscalité et des dépenses publiques.
Pierre Sabatier observe que le pouvoir d’achat en biens immobiliers des ménages n’a jamais été aussi faible qu’aujourd’hui (moins 43 % depuis 1998). Aussi estime-t-il que si la correction devait être moins brutale qu’aux États-Unis, un simple retour à la moyenne ratio prix/revenu signifierait une chute des prix de 40 % soit moins 7 % par an pendant 7 ans.
On peut craindre d’être à la veille de la fin de « l’exception française » dans l’immobilier avec une fourchette de baisse des prix qui devraient osciller entre 20 et 43 % selon les hypothèses retenues. L’image de valeur refuge acquise par l’immobilier en France depuis 15 ans risque d’être largement altérée, d’où un appel pressant de Pierre Sabatier pour que l’ensemble des acteurs de ce secteur (État, promoteurs, financiers) accélère leur prise de conscience de cette tendance sans doute irréversible, et entre en synergie pour faire en sorte que la dégradation soit limitée et étalée sur une décennie.
Jean-Louis CHAMBON.
Président du Prix Turgot.
En savoir plus :
- La chronique « Économique et finance » de Jean-Louis Chambon sur Canal Académie
- Site du Cercle Turgot
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