Erik Orsenna : Il faut écouter les leçons de la pluie !
Ecoutez Erik Orsenna, de l’Académie française, parler des problèmes liés au climat et nous sensibiliser aux questions de l’eau. Il intervenait le 14 mai 2008 à l’Ecole Normale Supérieure de la rue d’Ulm à Paris.
Erik Orsenna, très sensibilisé à la question environnementale, a travaillé sur l'eau et le climat en collaboration avec de grands scientifiques. Comme il le dit lui-même : Je ne connais absolument rien aux sciences mais j'ai une vraie passion pour les sciences.
Contribuer à raconter l'histoire de la planète, c'est répondre aux questions de notre temps. L'eau, élément fondamental de la condition de notre survie, reste la matière première par excellence. Il faut prendre conscience de certains aspects qui la caractérisent : la gratuité ou encore la relation privé-public.
Que signifie le réchauffement climatique ?
Pour nous éclairer sur cette question, Erik Orsenna explique : «Il faut apprendre les leçons de la pluie ! Quarante-cinq pour cent des habitants de la planète dépendent d'un fleuve qui descend de l'Himalaya.» Autant dire que les conditions naturelles de la géographie sont bien injustes. Certains continents regorgent d'eau tandis que d'autres en manquent cruellement. Il prend en exemple l'Australie : un pays qui peut souffrir de sécheresses terribles ; un pays pourtant riche qui gaspille énormément d'eau.
Mais comment faire comprendre ces réalités ?
La meilleure façon est de raconter des histoires et d'aller prendre conscience de l'état de la situation sur le terrain. Les voyages aident à réaliser les tourments de la population fragilisée. Erik Orsenna nous fait partager des lieux qu'il a visités, des moments émouvants vécus auprès de personnes vulnérables. Il parle du Bangladesh, un pays meurtri par les désastres de l'eau. Une grande partie de la population se retrouve désemparée face aux intempéries, aux inondations. Beaucoup deviennent des réfugiés climatiques. Car le terme n'est pas trop fort. La population se retrouve sans récolte de riz, sans logement et faisant face au problème sanitaire. La terre reste une peine de chaque instant car losque l'on creuse, il y a une chance sur deux pour trouver de l'arsenic. Comment alors faire pousser le riz ?
Nous partons ensuite en Chine à la rencontre du "patron de l'eau". «C'est un cas intéressant», déclare Erik Orsenna, «que d'étudier la Chine avec ses 12m50 de pluie chaque année !». Il nous raconte l'étonnement du Chinois devant les 830 mm bretons. Il est stupéfait d'apprendre la régularité des pluies en France ; effaré d'apprendre que tout un territoire peut recevoir de l'eau. «Eh oui», lui rétorque Erik Orsenna, «il peut pleuvoir en août à Brest...»
Cette fascination des pays tempérés reste cependant bien marginale car, quand Erik Orsenna nous cite l'exemple du Maroc et plus précisément du nord du pays, nous découvrons une situation terrible. La disparition de l'eau est si importante que la population en vient à la pomper sur la nappe. Résultat : cette dernière descend chaque année de 1 à 3 mètres. Conséquence : le pays déclare la guerre à l'eau. Pour une famille marocaine «l'eau c'est la grande peine». Elle doit lutter contre le manque et tenter de récupérer le liquide provenant de la pluie bien que trop rare. On trouve alors des bidons disposés un peu partout dans la maison. Facile d'imaginer les inconvénients d'une vie si contraignante.
Au fond, comme le dit notre orateur, le vrai problème ce n'est pas l'eau, la sécheresse ou le réchauffement climatique, «il y a une seule vraie rareté dans notre monde : c'est la terre arable». «Comment va t-on nourir 9 milliards de personnes avec une terre qui diminue de plus en plus par l'érosion, l'urbanisation et la pollution ?»
A écouter aussi :
- Erik Orsenna, de l’Académie française : L’Entreprise des Indes
- L’Essentiel avec... Erik Orsenna, de l’Académie française
En savoir plus :
Quelques livres de Erik Orsenna sur la question environnementale