En habit vert : Hélène Carrère d’Encausse
Hélène Carrère d’Encausse évoque ici sa fonction de Secrétaire perpétuel, constate quelques progrès dans l’intégration de femmes en académies et raconte plusieurs anecdotes relatives au 14e fauteuil qu’elle occupe à l’Académie française. Puis elle parle de la Russie, rappelant brièvement son histoire en Europe malgré la période de ténèbres liée au communisme.
Le Secrétaire perpétuel de l'Académie française a l'expérience, et pour cause, de la place des femmes au sein des académies ! Elue en 1990, reçue sous la Coupole en 1991, Hélène Carrère d'Encausse y a rejoint Jacqueline de Romilly et Florence Delay. Depuis, Assia Djébar a complété le nombre de femmes de l'Académie française dont la première élue fut, on le sait, Marguerite Yourcenar. Laquelle n'était pas, rappelle Mme Carrère d'Encausse, la première femme à intégrer une académie puisque la première fut, à l'Académie des sciences morales et politiques, Marianne Bastid, mère de l'actuelle académicienne Marianne Bastid-Bruguière.
Hélène Carrère d'Encausse, 33e Secrétaire Perpétuel de l'Académie française, reste néanmoins la première femme à occuper cette fonction. Admettant volontiers que les femmes sont peu nombreuses dans les académies, elle conclut cependant : "Je ne pleure pas sur cette situation. Je constate les progrès accomplis, ils sont spectaculaires".
Note de la rédaction : cette émission avec Madame Carrère d'Encausse ayant été enregistrée en 2006, les noms et les chiffres qu'elle indique ici datent de cette époque. Depuis, en 2007, il faut déplorer le décès de Madame Colette Caillat, à l'Académie des inscriptions et belles-lettres ; l'élection de Madame Brigitte Terziev à l'Académie des beaux-arts ; les élections de Madame Delmas-Marty et Madame Chantal Delsol, à l'Académie des sciences morales et politiques ; et, à l'Académie des sciences, en décembre 2007, l'élection de deux nouvelles académiciennes : Catherine Césarsky et Catherine Dulac.
Puis elle relate l'histoire du 14e fauteuil, un fauteuil prestigieux où se sont succédés, pour ne citer que les plus illustres occupants : les deux Corneille, Pierre (durant 34 ans !) et Thomas, Victor Hugo (durant 41 ans, record de longévité), Leconte de Lisle, Lyautey, et son prédecesseur Jean Mistler.
Interrogée sur les relations du Secrétaire Perpétuel avec le protecteur de l'Académie, le chef de l'Etat, Hélène Carrère d'Encausse reconnait que le lien est ténu mais non inexistant puisque la réception par le Chef de l'Etat du nouvel élu tient lieu de décret. Le Général de Gaulle avait ainsi déclaré qu'il ne souhaitait pas recevoir Paul Morand... qui mit donc fort longtemps à être reçu sous la Coupole !
Evoquant son discours du 28 novembre 1991 dans lequel elle se qualifie elle-même "d'enfant venue de loin", Hélène Carrère d'Encasse rappelle brièvement les grandes étapes de l'histoire de la Russie qui font que ce pays est "un pays d'Europe arraché à l'Europe". Le rideau de fer du communisme a en effet coupé la Russie de l'Europe mais, par son histoire autant que sa culture et sa religion chrétienne, la Russie demeure un pays européen. Elle rappelle que l'accord de Corfou en 1974 a marqué la Russie dans sa relation à l'Europe.
Puis elle s'exprime sur "l'innacceptable", l'idéologie pervertie du communisme, insistant sur un point : on ne saurait réduire la Russie à ce temps de ténèbres comme on ne saurait réduire l'Allemagne au nazisme. Le XXe siècle fut celui des mensonges et "j'ai essayé, dit Hélène Carrère d'Encausse, d'être le passeur de voix étouffées sous les décombres pour qu'elles puissent se faire entendre".
En savoir plus :
- Lisez le discours de réception d'Hélène Carrère d'Encausse par Michel Déon
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