Paul Valéry : le poète paradoxal
Paul Valéry (1871-1945) fut, certes, poète, mais aussi un brillant esprit scientifique. Sa vie fut ponctuée de prises de position courageuses. Le 16 mars 1972, lui était rendu à l’Institut de France un vibrant hommage. Prenaient respectivement la parole pour lui brosser un portrait à trois voix : Gaston Palewski, de l’Institut ; René Huyghe, de l’Académie française et Jean Guitton, de l’Académie française.
Par un curieux paradoxe, Paul Valéry essentiellement connu du grand public comme le poète auquel on doit Le Cimetière marin et La jeune parque, fut avant tout l'un des esprits scientifiques les aiguisés de son époque et, à ce titre, l'interlocuteur privilégié d'Albert Einstein, de Louis de Broglie ou de Raymond Poincaré.
Passionné d'art, ce disciple de Stéphane Mallarmé fréquenta les grands salons artistiques et littéraires du Paris du premier XXe siècle. Il fut à ce titre l'ami de Manet et de Degas, de Pierre Louÿs et de Maurice Ravel...
Professeur au Collège de France (c'est pour lui que l'on créa la chaire de poétique), il fut élu à l'Académie française en 1925.
Sa réception sous la coupole donna lieu à un épisode resté fameux puisque le poète réussit le tour de force de ne jamais citer son prédécesseur au 38e fauteuil : l'écrivain Anatole France à qui il n'avait pas pardonné le refus de publier (cinquante-trois ans plus tôt !) le manuscrit de L'Après-Midi d'un faune, de Stéphane Mallarmé, dans la revue Le Parnasse français...
Quand éclate la Seconde Guerre mondiale, Paul Valéry choisit son camp et ne s'en cache pas : le discours d'hommage qu'il prononce à la mort de Bergson fut jugé par ses pairs comme un acte de bravoure et de résistance. Un geste confirmé par l'opposition du poète à son collègue académicien Abel Bonnard qui souhaitait que l'Académie rende hommage au maréchal Pétain, après la rencontre de Montoire. Le refus de Valéry avait d'autant plus de portée qu'il était celui que l'Académie avait désigné, en 1931, pour accueillir Philippe Pétain, sous la coupole...
A sa mort (le 20 juillet 1945), Paul Valéry a eu droit à des obsèques nationales, sur volonté du général de Gaulle.
Cette émission En Habit vert brosse le portrait d'une des plus brillantes intelligences de son temps, évoquée à partir des discours de trois hommes qui l'ont côtoyé à l'Institut : le diplomate et homme politique Gaston Palewski, le philosophe de l'art et conservateur du Louvre René Huyghe et le philosophe chrétien Jean Guitton.
Un "portrait à trois voix" habillé par la douce et mélancolique mélodie de la Sonate pour flûte et piano de Francis Poulenc et par la lecture d'un court extrait du célèbre Cimetière marin.
Bibliographie :
Correspondance à trois voix (1888-1920) : André Gide, Pierre Louÿs et Paul Valéry; 2004, édition de Peter Fawcett et Pascal Mercier, 1696 pages; Collection blanche, Gallimard.
Correspondance (1890-1942) : préface et notes de Robert Mallet, 560 pages; Collection blanche, 1955, Gallimard.
La Jeune parque : nouvelle édition de 1992 du texte de l'édition de 1942, 472 pages; Collection blanche, 1992.
Introduction à la méthode de Léonard de Vinci, 176 pages, nouvelle édition de 1992; Collection Folio essais.
Monsieur Teste, 154 pages, édition de 1978; Collection L'Imaginaire, Gallimard.
En savoir plus sur :
- Paul Valéry de l'Académie française