Benoît XVI, cardinal Ratzinger, et la revue Communio
Jean Duchesne est l’un des fondateurs de l’édition française de la revue Communio. Il connaît le Cardinal Ratzinger depuis plus de trente ans, et dresse ici son portrait tout en présentant l’histoire de cette revue.
Benoit XVI vient de quitter Paris après y avoir passé plusieurs jours (12-15 septembre 2008). Il nous a semblé intéressant de demander à Jean Duchesne, l’un des fondateurs de l’édition française de la revue Communio, de venir nous dire quelques mots sur Joseph Ratzinger qu’il connaît depuis plus de trente ans. Il faut dire que Joseph Ratzinger, devenu depuis le pape Benoît XVI, fut l'un des cofondateurs de la Revue catholique internationale Communio que proposait de lancer, en 1969, Hans-Urs von Balthasar.
L'édition francophone de la revue Communio, fondée en 1975, traduisit presque systématiquement les contributions de l'archevêque de Munich-Freysing, appelé par la suite à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi : trente articles en trente ans, qui jalonnent l'histoire des défis que l'Eglise eut à relever dans la période agitée de l'après-concile. Qu'il s'agisse des fondements de la foi, du sens de la liturgie et des sacrements ou du rapport du chrétien au monde sur le difficile chemin de crête entre l'engagement sociopolitique et le souci du transcendant, le cardinal Ratzinger fut un théologien engagé dans le débat et un pasteur qui "par amour du Christ et de ses frères, est désireux de rendre compte rationnellement de la vérité chrétienne et, en même temps, a le souci de promouvoir l'unité et la compréhension mutuelle", selon le message que lui adressa Jean-Paul II, à l'occasion des vingt ans de Communio.
Un livre vient de paraître Croire et Célébrer (Edition Communio-Parole et silence) qui reprend dans ce premier volume, qui sera suivi d’un second, les nombreux articles rédigés par le cardinal Ratzinger pour la revue Communio.
Revue Communio et le Cardinal Ratzinger
La revue Communio est née de l’inspiration du théologien allemand Hans Urs Von Balthasar (1905-1988). Ce théologien bâlois avait formé un groupe de réflexion rassemblant autour de lui quelques théologiens de haut niveau, notamment pour dépasser la division simpliste de la théologie moderne entre « conservatisme » ou « progressisme », dans le contexte post-conciliaire : en faisaient notamment partie Henri de Lubac (de l'Académie des sciences morales et politiques), Louis Bouyer, J. Medina, M. L. Le Guillou et le jeune Joseph Ratzinger, alors professeur de théologie à Tuebingen. Ce groupe lança l’idée d’une revue internationale, devenue Communio avec notamment le soutien du mouvement italien « Comunione e Liberazione ».
En 1972, paraissent simultanément les éditions allemande et italienne de la revue. L’édition française a été prise en charge par le cardinal Jean Daniélou (de l'Académie française), l’abbé Charles, alors recteur de la basilique du Sacré Cœur, avec de jeunes étudiants et chercheurs catholiques tels que Jean Duchesne, Marguerite Léna, le R. P. Jean-Robert Armogathe, ainsi que les philosophes Jean-Luc Marion et Rémi Brague. La mort du cardinal Daniélou en 1973 remit un instant en cause le projet, finalement mené à bien de manière indépendante des grandes maisons d’édition.
Dans un article de 1993, le cardinal Joseph Ratzinger résumait ainsi la vocation de la revue Communio : « La communion des hommes entre eux n’est possible qu’à partir de Dieu qui, par le Christ, rassemble les hommes dans l’Esprit saint afin qu’ils forment une communauté – l’Eglise, au sens propre du terme… la tâche de la revue doit être de conduire vers ce véritable en-haut qui disparaît sous un regard simplement sociologique ou psychologique… elle doit conserver et approfondir la parole de Dieu et développer ainsi, avec la théologie, une anthropologie qui va jusqu’à ses racines ». De 1978 à 2004, le cardinal Ratzinger a publié 35 articles dans la revue.
A écouter également :
- Réception du philosophe Jean-Luc Marion à l’Académie française
- Rémi Brague, membre de l’Académie des sciences morales et poitiques, le philosophe qui prend au sérieux le « fait religieux »
En savoir plus :
La revue Communio