Cicéron a toujours des amis !
Philippe Rousselot préside la Société Internationale des Amis de Cicéron (SIAC) et explique ici comment la pensée de l’orateur romain, ardent défenseur de la République, est toujours un modèle pour les hommes politiques, essentiellement dans le monde anglo-saxon.
C'est au cours du Festival international du Latin-Grec, organisé par Elizabeth Antébi et dont Jacqueline de Romilly est la marraine d'honneur, qui s'est tenu au printemps 2010 à Luxembourg, que Canal Académie a rencontré un ami de Cicéron ! Il est aujourd'hui notre invité pour nous présenter les objectifs et les travaux de cette surprenante association : la Société Internationale des Amis de Cicéron (SIAC).
Philippe Rousselot préside donc cette association Loi 1901 d'intérêt général qui a deux ans d'ancienneté et devient visible grâce à son site Internet trilingue, français, anglais, italien (espagnol en cours).
Une vocation internationale pour cette plateforme qui regroupe l'ensemble des personnes qui souhaitent se retrouver pour diffuser les connaissances concernant Cicéron et plus largement la littérature latine, la rhétorique et l'histoire de la République tardive.
Ouverte à tous publics, on peut noter que le profil des membres est de 15 % d'adhérents simples, par sympathie pour Cicéron (de l'étudiant au banquier), et 85% de membres "scientifiques" : des chercheurs (souvent enseignants). La SIAC diffuse une gazette trimestrielle en quatre langues, Gazette de Tulliana, qui fait le point des ouvrages parus, sur les travaux publiés, les colloques et les séminaires.
Car Cicéron génère beaucoup d'actualité ! La production livresque est considérable (entre 20 et 30 ouvrages par an, des thèses et des centaines d'articles).
Philippe Rousselot reste fidèle, après ses études classiques, à Cicéron. Un jour, il lui a semblé utile de créer un site Internet consacré à l'orateur romain, sur les conseils de Carlos Lévy, professeur de latin à Paris-IV Sorbonne.
Cicéron, rappelons-le, est né en -106 et a fini exécuté par Marc-Antoine. Pourquoi fascine-t-il aujourd'hui ?
Plusieurs réponses à cette question :
- si vous êtes un littéraire, vous serez sensible à la qualité de son style, à la pureté de sa langue,à la technique d'écriture qu'il a théorisée.
- si vous êtes philosophe, vous serez attiré par ses vues philosophiques qui font l'objet depuis une vingtaine d'années d'un regain d'intérêt. Au point que Cicéron est inscrit au programme 2011 d'agrégation de philosophie. Une reconnaissance nouvelle.
- si vous êtes historien ou politologue, vous vous intéresserez à lui qui a été un personnage majeur de la fin de la République romaine, chef de l'exécutif quand il était Consul (Cf la Conjuration de Catilina). Sa principale difficulté a été la montée en puissance des hommes forts, des généraux, qui prenaient le pouvoir en s'appuyant sur leurs armées personnelles, en s'affranchissant de toutes les lois en place. Cicéron s'est toujours opposé à cette autocratie, désaveu des institutions républicaines. Il était aussi le porteur d'une conception nouvelle de la République, -le concept de culture est né sous sa plume.
Cicéron, modèle pour les hommes politiques aujourd'hui ?
- En France, il n'apparait pas de manière évidente qu'il soit un modèle, mais n'oublions pas que Jaurès et Léon Blum étaient de fins connaisseurs de Cicéron. En revanche, dans le monde anglo-saxon, il est vraiment tenu pour un modèle, comme personnage anciennement installé dans la mémoire collective. Les Pères fondateurs aux Etats-Unis admiraient Cicéron, les premiers Présidents ont même écrit des ouvrages sur Cicéron (Franklin). Pour la rédaction de la Constitution américaine, Cicéron a été un auteur de référence. Et aujourd'hui, personne ne l'a oublié ! On ne peut pas aller jusqu'à dire que les personnalités politiques américaines actuelles soient des familiers de Cicéron mais on peut en repérer qui semblent s'inspirer de lui (Kennedy par exemple, qui a écrit "Profil in Courage"). Cicéron reste donc un "exemplum". La société américaine, par les politologues, qualifie volontiers quelques hommes politiques de "cicéroniens", bons orateurs qui parviennent à gagner par la force du discours. Et le président Obama, quant à lui, a été qualifié de cicéronien à peine élu, la presse n'hésitant pas à dresser un parallèle entre lui et le romain, même si l'on ne trouve pas de références directes à Cicéron dans ses discours.
Notre invité termine cette émission sur le rayonnement de Cicéron et la riche postérité de sa pensée.
Le site à consulter : http://www.tulliana.eu/
On peut contacter Philippe Rousselot : president@tulliana.eu
ou le vice-président Ermanno Malaspina : vicepresident@tulliana.eu