Thomas Mann et le Docteur Faustus, le diable et la musique, par Serge Nigg, l’Académie des beaux-arts
Le compositeur Serge Nigg s’exprime sur le lien entre la littérature et la musique à travers l’ouvrage de Thomas Mann, Docteur Faustus, publié en 1947.
_ Serge Nigg, est connu pour avoir écrit en 1946 en France, la première œuvre rigoureusement sérielle, Variations pour piano et dix instruments, puis pour avoir pris le contre-parti de cette technique musicale, pour finalement, dans les années soixante renouer avec une technique dodécaphonique retrouvée. Sa communication, le 26 avril 2006, est consacrée au roman de Thomas Mann, Docteur Faustus, dont le héros imaginaire, compositeur, lui aussi, n'a pas pu laisser Serge Nigg indifférent. Son regard sur cette œuvre littéraire, sur le mythe faustien et le génie créateur, sur la théorie musicale et son histoire, invite à la découverte de ces œuvres majeures du XXe siècle où littérature et musique jouent la même partition.
Quelques mots sur Thomas Mann et Le Docteur Faustus
Thomas Mann, témoin privilégié des bouleversements historiques de la société munichoise, s'est d'abord fait connaître par un recueil de nouvelles puis par le célèbre roman Les Buddenbrook en 1901, où il traque dans cette dynastie marchande les prodromes de la montée du nazisme. Dans son livre La Montagne magique, publié en 1924, apparaît la figure de l'artiste solitaire et la recherche de l'harmonie individuelle. En 1929, il reçoit le prix Nobel de littérature. Il quitte l'Allemagne en 1933, à l'arrivée d'Hitler au pouvoir, émigre en Suisse puis aux Etats-Unis. En 1947, il publie Docteur Faustus où il décrit la vie d'un musicien imaginaire Adrian Luverkühn. Durant leur exil californien, Adorno, Arnold Schoenberg et Thomas Mann vivaient en relatif voisinage. Le héros du Docteur Faustus , à qui Thomas Mann prête l'invention de la musique sérielle, ressemble à Schoenberg et Nietzsche. Devant les protestations de Schoenberg, Thomas Mann ajouta une petite note, à la fin de son livre restituant à Arnold Schoenberg la paternité de l'invention de la forme de composition musicale exposée au chapitre XXII, connue sous le nom de système dodécaphonique ou sériel.
Biographie
Serge Nigg a été l'élève d'Olivier Messiaen et de Simone Plécaussade au Conservatoire national supérieur de musique de Paris pendant la Seconde Guerre mondiale. Il s'initie alors à la technique dodécaphonique avec René Leibowitz.
En 1943, à l'âge de 20 ans, ses premiers ouvrages, une sonate et une œuvre symphonique, sont donnés en concert.
En 1946, il écrit ce qu'on considère aujourd'hui, comme la première oeuvre dodécaphonique connue en France Les variations pour piano et 10 instruments.
Dans les années cinquante et soixante, il s'éloigne de la musique sérielle dont la tendance stérilise l'inspiration. A la recherche d'un nouvel équilibre et de la beauté sonore, il écrit des œuvres inspirées de peintres et de poètes comme Jérôme Bosh, Blaise Cendrars, Mallarmé, Villiers de l'Isle-Adan, Antonin Artaud ou William Blake.
À partir de 1978, il enseigne au Conservatoire national supérieur de musique de Paris.
Serge Nigg a écrit de la musique symphonique, de la musique pour orchestre, de la musique pour des instruments particuliers, de la musique funèbre, de la musique concertante, de la musique vocale, pour la radio et pour des films.
En 1989, il est élu à l'Académie des beaux-arts au fauteuil d'Emmanuel Bondeville, dans la section V, celle de la Composition musicale.
Il a été président de l'Académie des beaux-arts en 1995 ; la même année, il assura la présidence de l'Institut de France.
En savoir plus :
Pour retrouver les interprètes les plus éminents et les orchestres de tout pays qui ont joué ses compositions, pour connaître ses nombreux prix, le catalogue complet de ses œuvres et ses discours dans l'enceinte de l'Institut de France, rendez-vous sur le site de l'Académie des beaux-arts.
Lire le texte du discours prononcé par Daniel-Lesur lors de la réception de Serge Nigg, le 16 mai 1990 et celui prononcé par Serge Nigg, le même jour en hommage à son prédécesseur Emmanuel Bondeville, cliquez sur le lien.
Thomas Mann, Le Docteur Faustus, édition Le livre de poche, 2004
A noter :
Goethe, Faust, Edition Bartillat,2009