Rentrée solennelle de l’Académie française 2011
La séance de rentrée solennelle de l’Académie française s’est tenue le jeudi 1er décembre 2011 sous la Coupole de l’Institut de France. Cette retransmission vous permet d’écouter le discours sur les Prix littéraires, par Angelo Rinaldi, directeur en exercice. Le Discours sur Chateaubriand élu à l’Académie française il y a deux siècles. "Chateaubriand et Napoléon" par Hélène Carrère d’Encausse, Secrétaire perpétuel. Et le traditionnel discours sur la vertu, par Pierre Rosenberg, directeur de la séance.
Angelo Rinaldi, directeur en exercice, a remis les différents prix décernés par l'Académie française.
Mesdames, Messieurs,
Au seuil d’une liste de noms qui pourrait à la fois sembler riche et
longuette, comment ne pas penser à Oscar Wilde, notre voisin à deux
rues d’ici, où, à l’hôtel d’Alsace, dans son exil il soupirait : « L’Angleterre
a eu ma peau ; la France aura mes os. » Il avait effectué une tournée de
conférences aux États-Unis. Son sujet ? Sa propre personne et son
oeuvre. Mais on se lasse de tout, même de soi, bien que notre vie ne soit, au fond, qu’une rumination intérieure sans fin.
Assez vite, Oscar Wilde substitua à son thème d’élection un inventaire de l’histoire des lettres dans son pays, indifférent à la
chronologie, sautant sans le dire d’une époque à l’autre, les écrivains
surtout saisis par l’aspect aventureux de leur vie ou par d’exemplaires
malheurs. Car, vous le savez, souvent l’artiste ressemble au kamikaze qui saute avec sa bombe. Il n’était pas rare que dans quelque grange de l’Idaho ou du New-Jersey, devant un parterre de vachers – en français des coves-bois – un Lucky Luke de la localité, les pieds sur le dossier de la chaise de son voisin de devant, s’écriât avec transport : « Celui-là, pourquoi ne l’avez-vous pas emmené avec vous ? »
Retrouvez ici l'intégralité de son discours
Grand Prix de la Francophonie : Abdellatif LAÂBI
Grande médaille de la Francophonie : Daryush SHAYEGAN
Grand Prix de Littérature : Jean-Bertrand PONTALIS, pour
l’ensemble de son oeuvre
Grand Prix de Littérature Henri Gal (Prix de l’Institut de
France) : Yasmina KHADRA, pour l’ensemble de son oeuvre
Prix Jacques de Fouchier : Francis HALLÉ, botaniste, pour ses
essais
Grand Prix du Roman : Sorj CHALANDON, pour Retour à
Killybegs
Prix de l’Académie française Maurice Genevoix : Alain
BORER, Le Ciel et la Carte. Carnet de voyage dans les mers du Sud à bord de La
Boudeuse
Prix Hervé Deluen : Moussa KONATÉ, qui oeuvre, par ses
ouvrages et son travail d’éditeur, à la diffusion de la littérature
francophone au Mali
Grand Prix de Poésie : Franck VENAILLE, pour l’ensemble de
son oeuvre poétique
Grand Prix de Philosophie : François JULLIEN, pour
l’ensemble de son oeuvre
Grand Prix Gobert : Michel WINOCK, pour Madame de Staël et
l’ensemble de son oeuvre
Prix de la Biographie littéraire : Jean-Luc BARRÉ, pour
François Mauriac. Biographie intime
Prix de la Biographie historique : Philippe PAQUET, pour
Madame Chiang Kai-shek. Un siècle d’histoire de la Chine
Prix de la Critique : Tzvetan TODOROV, pour l’ensemble de
son oeuvre critique
Prix de l’Essai : Sébastien ALLARD et Marie-Claude
CHAUDONNERET, pour Le Suicide de Gros. Les peintres de l’Empire et de la génération romantique _
Prix de la Nouvelle : Thomas CLERC, pour L’Homme qui tua
Roland Barthes
Prix d’Académie
- Albert BENSOUSSAN, pour l’ensemble de ses
traductions
- Sue CARRELL, pour son édition de la correspondance de la
comtesse de Sabran et du chevalier de Boufflers
- Alain LOTTIN, pour son édition de « Chronique mémorial des choses
mémorables par moy Pierre-Ignace Chavatte »
- Annette WIEVIORKA, pour Maurice et Jeannette. Biographie du couple
Thorez
_
Prix du Cardinal Grente : P. Bernard SESBOÜÉ, pour
l’ensemble de son oeuvre
Prix du Théâtre : Denise CHALEM
Prix du Jeune Théâtre Béatrix Dussane-André Roussin :
Alexandre de LA PATELLIÈRE et Matthieu DELAPORTE, pour Le Prénom
Prix du Cinéma René Clair : Danièle THOMPSON
La Grande Médaille de la Chanson française : David
MCNEIL
Prix du Rayonnement de la Langue et de la Littérature
françaises :
- Akira MIZUBAYASHI, pour Une langue venue d’ailleurs
- Association GALLICA
- Claudette HOULD, spécialiste d’histoire de l’art français
- Isabelle DAUNAIS, professeur de langue et de littérature
françaises à l’université McGill de Montréal
- Rokaya Eugénie AW, directrice du Centre d’études des sciences
et techniques de l’information à Dakar
PRIX DE POÉSIE
Prix Théophile Gautier : Jacques JOUET, pour L’Histoire poèmes
Médaille de bronze du Prix Théophile Gautier : Anise
KOLTZ, pour Je renaîtrai
Prix Heredia : Lorand GASPAR, pour Derrière le dos de Dieu
Prix François Coppée : Jean-François LOPEZ, pour S’appuyer
sur le vent. Poésies marines
Prix Paul Verlaine : Marie ÉTIENNE, pour Le Livre des recels et
Haute lice
Prix Maïse Ploquin-Caunan : Jérôme LEROY, pour Un dernier
verre en Atlantide
Prix Henri Mondor : Thierry ROGER, pour L’Archive du Coup
de dés
PRIX DE LITTÉRATURE ET DE PHILOSOPHIE
Prix Montyon : Stéphane CHAUVIER, pour Le Sens du possible
Prix La Bruyère : Emmanuel HOUSSET, pour Husserl et l’idée de
Dieu
Prix Jules Janin : Philippe BRUNET, pour sa traduction de l’Iliade
Prix Émile Faguet : Gilles PHILIPPE, pour Le français, dernière
des langues. Histoire d’un procès littéraire
Prix Louis Barthou : Marc WEITZMANN, pour Quand j’étais
normal
Médaille d’argent du Prix Louis Barthou : Marguerite
MUTTERER, pour Le récit de Margh (1938-1945)
Prix Anna de Noailles : Colombe SCHNECK, pour Une femme
célèbre
Prix François Mauriac : Thomas B. REVERDY, pour L’Envers
du monde
Prix Georges Dumézil : Thora VAN MALE, pour Liaisons
généreuses. L’apport du français à la langue anglaise
Prix Roland de Jouvenel : Jérôme PRIEUR, pour Rendez-vous
dans une autre vie
Prix Biguet : Françoise WAQUET, pour Respublica academica.
Rituels universitaires et genres du savoir (XVIIe – XXIe siècle)
Prix Ève Delacroix : Olivia ROSENTHAL, pour Que font les rennes
après Noël ?
Médaille d’argent du Prix Ève Delacroix : Michel MEULDERS,
pour William James
Prix Jacques Lacroix : Marc BOCHET, pour L’Âne, le Job des
animaux et Carole FERRET, pour Une civilisation du cheval. Les usages de l’équidé de la steppe à la taïga
Prix Sivet : Christian SIGNOL, pour Une si belle école
PRIX D’HISTOIRE
Prix Guizot : Charles-Édouard LEVILLAIN, pour Vaincre
Louis XIV. Angleterre-Hollande-France. Histoire d’une relation triangulaire
1665-1688
Médaille d’argent du Prix Guizot : Frank ATTAR, pour Aux
armes citoyens ! Naissance et fonctions du bellicisme révolutionnaire
Prix Thiers : Gérard JORLAND, pour Une société à soigner. Hygiène
et salubrité publiques en France au XIXe siècle
Prix Eugène Colas : Johann CHAPOUTOT, pour Le Meurtre de
Weimar
Prix Eugène Carrière : Patrick MICHEL, pour Peinture et plaisir.
Les goûts picturaux des collectionneurs parisiens au XVIIIe siècle
Prix Georges Goyau : Ludovic FROBERT, pour Les Canuts ou la
démocratie turbulente. Lyon 1831-1834
Prix du maréchal Foch : Xavier RAUFER, pour Les Nouveaux
Dangers planétaires. Chaos mondial, décèlement précoce
Prix Louis Castex : Vincent DEBAENE, pour L’Adieu au voyage.
L’ethnologie française entre science et littérature et Alix DE SAINT-ANDRÉ, pour En avant, route !
Prix monseigneur Marcel : Anne-Marie LECOQ, pour Le
Bouclier d’Achille. Un tableau qui bouge
Médaille d’argent du Prix monseigneur Marcel : Étienne
VAUCHERET, pour Brantôme mémorialiste et conteur
Prix Diane Potier-Boès : Henri DE WAILLY, pour Liban, Syrie.
Le mandat 1919-1940
Prix François Millepierres : Catherine BAROIN, pour Se
souvenir à Rome. Formes, représentations et pratiques de la mémoire
Médaille d’argent du Prix François Millepierres : Nicolas
LYON-CAEN, pour La Boîte à Perrette. Le jansénisme parisien au XVIIIe siècle
Médaille d’argent du Prix François Millepierres : Thierry
SARMANT et Mathieu STOLL, pour Régner et gouverner. Louis XIV et ses
ministres
PRIX DE SOUTIEN À LA CRÉATION LITTÉRAIRE
Prix Henri de Régnier : Guillaume MÉTAYER, après Anatole
France et le nationalisme littéraire. Scepticisme et tradition
Prix Amic : Catherine ENJOLET, après Sous silence
Prix Mottart : Stéphane CORVISIER, après Reine de nuit
Suite à la remise de ces nombreux prix, Hélène Carrère d'Encausse, Secrétaire perpétuel, a prononcé un discours intitulé "Chateaubriand et Napoléon" qui relatait brillamment les relations de Chateaubriand et l'Académie française.
Mesdames, Messieurs de l’Académie,
En cette année 2011, il y a deux siècles tout juste, Chateaubriand
était élu à l’Académie française. Élu, mais jamais reçu car son discours
avait déplu à Napoléon. Tels sont dans leur sècheresse les faits qui
semblent en définitive pouvoir se réduire à un simple incident. Mais en
réalité, l’histoire académique de Chateaubriand est infiniment plus
complexe car elle s’inscrit dans la relation singulière qui unit
durablement l’Empereur et le poète, relations de fascination mutuelle et
d’irritation mutuelle.
Ce bicentenaire d’une élection en partie manquée nous offre
l’occasion de nous pencher sur le couple inséparable et toujours en
conflit que formèrent le grand Empereur, qui ressuscita les académies
après leur suppression par la Révolution, et le premier des
Romantiques ; il nous donne aussi la possibilité d’accueillir enfin, avec
deux siècles de retard, Chateaubriand sous la Coupole.
Retrouvez ici l'intégralité de son discours
Pour cette année 2011, c'est Pierre Rosenberg, directeur de la séance, qui a tenu le traditionnel discours sur la vertu.
Mesdames et Messieurs de l’Académie,
Le 5 juillet 2011 disparaissait à Rome le grand peintre américain
Cy Twombly. Ce jour là – pure coïncidence – j’étais à Dulwich pour
voir l’exposition Twombly-Poussin.
Pourquoi la College Picture Gallery de Dulwich ? Dulwich est
riche en oeuvres de Poussin, ses conservateurs avaient pu en emprunter plusieurs de grande qualité à d’importantes institutions européennes. Pourquoi Twombly ? À cette question, l’artiste a lui-même
répondu : « J’aurais aimé avoir été Poussin si j’avais eu le choix en un
autre temps… » Les titres de certaines de ses toiles – Arcadia, Venus +
Adonis, Quattro Stagioni ou Narcissus – confirment cette vénération et cet amour pour notre plus grand peintre. Comme Poussin, Cy Twombly
avait choisi l’exil à Rome. Comme lui, il rêvait, à l’aide de ses seuls
pinceaux, de faire revivre un monde antique à jamais disparu. À l’image
de celui de son modèle, le monde de Twombly est riche de références
cryptées aux grands mythes de l’Antiquité, Mercure, Hersé et Aglaure,
Apollon amoureux de Daphné, Bacchus et Ariane. J’avais pensé projeter
sur les murs qui soutiennent notre vénérable Coupole, comme j’avais pu
le faire à l’occasion des célébrations hugoliennes de 2002, des
reproductions d’oeuvres de Cy Twombly. J’ai, à vrai dire, reculé et ai
voulu éviter un sursaut à une partie de notre auditoire horrifié…
Retrouvez ici l'intégralité de son discours
- Vous pouvez lire l'intégralité des discours sur le site de l'Académie française
- Consultez la fiche d'Angelo Rinaldi sur le site de l'Académie française
- d'Hélène Carrère d'Encausse
- de Pierre Rosenberg