1806 : Chateaubriand en Grèce
Michel de Jaeghere, directeur de la rédaction des Hors Série du Figaro, et Jean-Paul Clément, correspondant de l’Académie des sciences morales et politiques, évoquent ici la place du voyage dans l’œuvre de Chateaubriand. L’écrivain aurait-il (légèrement) menti ? Peut-être... mais son génie littéraire n’en fait-il pas de lui un menteur magnifique ?
_ Le 200e anniversaire du voyage de Chateaubriand en Orient nous permet de réfléchir sur les rapports entre "vérité" et "littérature". En effet, dans son ouvrage Le menteur magnifique, Michel de Jaeghere[[Michel de Jaeghere est journaliste. Il dirige les collections de hors-séries du Figaro.]] nous présente le mensonge de Chateaubriand sur son voyage qui, paradoxalement, se trouve atténué grâce au génie de la langue.
Jean-Paul Clément[[Jean-Paul Clément est né le 23 décembre 1947 à Paris. Il a été élu Correspondant de l'Académie des sciences morales et politiques le 13 mars 1995 à la place de Pierre Flottes. Historien des idées politiques, il a dirigé la Maison de Chateaubriand à la Vallée-aux-Loups à Chatenay-Malabry.]], Correspondant de l'Académie des sciences morales et politiques, évoque, quant à lui, la place du voyage et de la patrie dans l'œuvre du grand auteur.
Chateaubriand fut élu, le 20 février 1811, membre de la Section de la Langue et de la Littérature françaises. Il fut nommé à l'Académie française, par l'ordonnance royale du 21 mars 1816.
En savoir plus :
- Le menteur magnifique : Chateaubriand en Grèce[[Le 10 août 1806, Chateaubriand débarque à Méthoni, à la pointe sud du Péloponnèse, pour une traversée de la Grèce qui doit lui permettre de visiter Sparte, Argos, Mycènes, Corinthe, Mégare, Éleusis, Athènes. Le récit enchanté de ce voyage au pays des héros d'Homère et de Plutarque occupe le premier tiers de son Itinéraire de Paris à Jérusalem. Chateaubriand s'y montre tour à tour savant, aventurier, archéologue, peintre de paysages, observateur de peuples, découvreur de cités. Faut-il le croire ?
Au terme d'une enquête qui tient tout à la fois de la traque policière, du commentaire de texte et de l'exercice d'admiration, Michel De Jaeghere a recoupé les dates, les récits et les témoignages pour tenter de reconstituer ce que fut la réalité de cette équipée. Il en ressort que Chateaubriand n'aura guère cessé de mentir, tout au long de son livre. L'archéologue était passé sans s'arrêter auprès de ruines illustres ; l'aventurier avait inventé l'essentiel de ses aventures ; le profond politique était en route pour un rendez-vous d'amour.
Le paradoxe est que Chateaubriand ne sort nullement diminué de cette confrontation avec la vérité, au contraire. En faisant de son Itinéraire un roman picaresque en même temps qu'un bréviaire des humanités classiques, ses mensonges ont dessiné le visage d'une Grèce idéale que les voyageurs romantiques n'ont plus cessé de tenter, après lui, de retrouver.,]] Ed. Les Belles Lettres, 2006