Comment protéger les paysages "naturels" ou urbains ? avec Jean-Robert Pitte
Le géographe Jean-Robert Pitte, de l’Académie des sciences morales et politiques, rappelle les diverses initiatives qui ont contribué à faire naître l’idée de protection du patrimoine paysager, tant celui de la nature que celui de villes.
Les paysages de la nature, mais aussi ceux de l'urbanisme, celui des cultures, autant que celui de l'architecture, constituent un patrimoine, c'est-à-dire un héritage (le mot lui-même suggère le père-pater) mais un legs du passé qui doit rester vivant. Il parle à toutes les générations, lesquelles ont envie de le protéger, de le maintenir mais sans le figer. Un paysage peut évoluer au fil des siècles dans le respect. Jean-Robert Pitte a tendance, comme il s'en explique ici, à se montrer réticent vis-à-vis d'une protection paysagère qui interdirait tout accès et toute présence humaine, comme on peut l'observer dans certains parcs naturels nationaux.
Ce mot "naturels" d'ailleurs, notre invité le conteste aussi : les paysages dits "naturels" ne le sont pas ! Tous sont imprégnés de la présence humaine. Et il explique comment cette conception nous est venue de l'Europe du Nord, de l'Amérique du Nord, des pays à majorité protestante. Les conceptions de la Nature (avec un grand «N») ne sont pas identiques dans ces traditions-là et dans celles issues de la Méditerranée. L'Homme a le droit et le devoir de créer des paysages, de les forger, pour qu'il s'y trouve bien, lui et tous les autres !
Jean-Robert Pitte insiste aussi sur la notion de "paysages urbains", une conception née au XVIe siècle, lorsque l'on a commencé à démolir certains vestiges du Moyen Âge au profit de la protection des ruines romaines. Le meilleur exemple en est les thermes de Cluny à Paris. Mais il donne également d'autres exemples répartis dans toutes les régions de France.
Enfin, sont évoquées quelques grandes figures auxquelles on doit la protection du patrimoine paysager : l'abbé Grégoire (lequel a créé le mot "vandalisme", le contraire de la conservation et de la protection), Victor Hugo (le premier à avoir choisi un monument comme personnage de roman), Arcisse de Caumont, Prosper Mérimée, Viollet Le Duc, et plus proche de nous, André Malraux qui, avec les lois secteur-protégé a permis la sauvegarde de tant de beaux quartiers dans de nombreuses villes françaises.
Dans son ouvrage Histoire du paysage français, l'auteur précise qu'en 2000, on compte en France :
- 7 parcs naturels nationaux (Vanoise, Écrins, Mercantour, Port-Cros, Cévennes, Pyrénées, Guadeloupe)
- 38 parcs naturels régionaux
- et 3 parcs en projet (Monts d'Ardèche, Oise pays de France, Guyane).
Écoutez deux autres chroniques autour de cette Histoire du paysage français avec Jean-Robert Pitte :
- Qu’est-ce qu’une "ville nouvelle" ? par Jean-Robert Pitte
- Jean-Robert Pitte raconte Le Corbusier et la Charte d’Athènes
À écouter aussi, ses autres chroniques : Géographie