Georges Chantraine : une vie au service de l’œuvre du cardinal de Lubac
Evocation de la personnalité du père jésuite Georges Chantraine qui, décédé brutalement le 23 mai 2010, a consacré une grande part de sa vie à l’oeuvre du Cardinal Henri de Lubac, lequel fut membre de l’Académie des sciences morales et politiques. Jacques de Larosière, successeur du cardinal à l’Académie, et notre collaborateur Damien Le Guay, rappellent ici l’immense travail entrepris par le père Chantraine auquel ils rendent un ultime hommage.
Georges Chantraine nous a quittés un jour de mai 2010, le 23, un dimanche de Pentecôte, de manière brutale et inattendue (crise cardiaque). Nous l'avions reçu plusieurs fois à Canal Académie pour qu'il évoquât le travail qu'il effectuait sur l'oeuvre du cardinal de Lubac (1896-1991), lequel fut membre de l'Académie des sciences morales et politiques Hommage au cardinal Henri de Lubac, par Jacques de Larosière, de l’Académie des sciences morales et politiques.
Nos deux invités : Jacques de Larosière, qui a succédé au Cardinal de Lubac à l'Académie, président de l'Association Internationale Cardinal de Lubac. Et Damien Le Guay, philosophe et collaborateur de Canal Académie qui, en bon connaisseur de l'œuvre du cardinal de Lubac, avait plusieurs fois interviewé le père Chantraine pour notre radio.
Le décès du père Chantraine est une perte terrible pour l'Association Internationale Cardinal de Lubac (fondée en 1996) car il en était le vice-président. Sous l'impulsion du cardinal Lustiger, le père Chantraine et un groupe de théologiens avaient en effet accepté d'éditer la cinquantaine d'ouvrages qui constituent l'œuvre du père de Lubac, et de mettre en ordre la multitude de ses notes et textes épars. A ce jour, 2010, une vingtaine d'ouvrages ont été publiés, l'affaire est donc bien engagée. Il va sans dire que le décès du père Chantraine ralentira l'immense travail entrepris car il en était la cheville ouvrière. Cependant, comme le précise Jacques de Larosière, l'essentiel de ce qui reste à faire, les deux tiers environ, a déjà été attribué à d'autres chercheurs et théologiens, "malheureusement, une grande part de ce travail restant revenait au père Chantraine... et il laisse un travail énorme derrière lui".
Georges Chantraine, Jacques de Larosière le rappelle, était un homme très chaleureux, direct, simple et un travailleur infatigable. "C'est pour moi une grande épreuve de le voir partir, confie Jacques de Larosière, car au fil des ans nous avions développé une véritable amitié. Il n'est pas remplaçable."
Au cours d'une promenade habituelle, après une courte sieste, il s'est effondré et n'a pu être réanimé. Triste fin ou belle fin ? En tous cas, un moment douloureux pour ses amis.
En plus de la mise en forme des oeuvres complètes du cardinal de Lubac lui-même, Georges Chantraine avait entrepris en quatre volumes une biographie.
- Deux premiers volumes (jeunesse et formation jusqu'en 1929) ont été publiés,
- le troisième (relatant la partie la plus connue de la vie de de Lubac, années 29 à 60) avait été laissé de côté pour plus tard,
- et il avait rédigé le 4ème sur la dernière partie de la vie (1960-1991) à paraître.
Damien Le Guay insiste sur l'amitié qui unissait le père Chantraine et le Cardinal de Lubac (qui avait une trentaine d'années de plus que lui) et raconte quelques anecdotes sur cette relation maître-disciple. Aussi, était-il le seul était capable de rédiger la biographie du Cardinal de Lubac.
Georges Chantraine, qui fut professeur à la faculté de théologie jésuite de Bruxelles, était l'exécuteur testamentaire du Cardinal, et il faut savoir que, dans les années 70-73, période de crise pour l'Église, il y avait un risque que tous ses papiers soient brûlés. Dans le centre de Namur, où le père Chantraine résidait, c'est plus de 70 000 pièces et papiers du Cardinal de Lubac qui ont ainsi été sauvés et conservés.
Pour terminer, Damien Le Guay souligne deux mots qui l'ont particulièrement frappé lors de ses entretiens avec le père Chantraine.
- le mot "Amitié". Chantraine avait insisté sur le don du Cardinal de Lubac à l'égard de l'amitié. "Ce que restitue tout le travail du père Chantraine, c'est de ce lien d'amitié dont il se sentait redevable".
- le mot "Souffrance". Quand on lit les livres de H. de Lubac, on comprend toutes les difficultés rencontrées, mais Chantraine témoigne de la souffrance personnelle (morale et physique).
A écouter :
- La jeunesse du cardinal Henri de Lubac
- Cardinal de Lubac, de l’Académie des sciences morales et politiques : les années de formation (1919-1929)
- Carnets du Concile du Cardinal de Lubac
- La prière du père Teilhard de Chardin par le cardinal de Lubac