Nus vénitiens, par Lucien Clergue
Lucien Clergue évoque l’année 1979 dans son travail photographique à Venise : regard sur une époque, un style étrangement inspiré du théâtre des années cinquante, en particulier du festival d’Avignon quand Agnès Varda était photographe plateau de Jean Vilar et qu’il avait 17 ans. Rencontre avec le photographe qui sait s’inspirer depuis longtemps de ses rencontres avec tous les arts, la peinture, le théâtre, le cinéma et la poésie.
Nus vénitiens n’est pas une simple invitation au voyage ; à travers les photographies du célèbre photographe, ami de Picasso et de Jean Cocteau, le lecteur est convié à inventer son propre récit, sa rêverie, ou son propre scénario. Lucien Clergue souhaite que le lecteur crée sa propre histoire au gré de ses photos mystérieuses associées à la plume de Marc Lambron.
Avec Nus vénitiens, Lucien Clergue renoue avec la maison d'édition de ses débuts. Corps mémorable, son premier livre, publié à l'âge de 23 ans était en effet sorti chez Seghers.
Venise n’est pas une cité comme les autres. Outre sa beauté architecturale, son nom évoque aussi bien Titien, Casanova, les jeux et les plaisirs dont elle s’était fait une spécialité dans l’Europe du XVIIIe siècle. De cette mythologie propre à la Cité des doges, Lucien Clergue a réalisé un scénario en images avec deux jeunes femmes, l’une blonde, l’autre brune et un jeune homme, un jour d’été, à l’étage noble et sous les toits d’un authentique palais vénitien. Il nous raconte, dans cette émission, cette histoire, celle de sa rencontre avec la lumière du Grand Canal et les modèles qui ont posé pour lui ce jour-là.
L’interview a été réalisée dans un café à proximité de la Foire ART ÉLYSEES, le 18 octobre dernier où il exposait à la Galerie Trigano quelques-unes de ces photographies et d’autres, plus emblématiques et plus connues comme celles issues de l’un de ses premiers travaux, sa série Saltimbanques. Sur le stand de la galerie, jour d’une signature à l’occasion de la sortie de Nus Vénitiens, quelques nus zébrés achevaient de vous transporter dans son œuvre argentique noir et blanc qui séduit par sa fausse simplicité et la rigueur de ses compositions.
Il confie : faire des photographies de nus à Venise, c’est le rêve absolu ! Il explique comment, en 1979, 24 ans après la série des Saltimbanques, il était influencé par deux visions : celle d’Agnès Varda, photographe plateau de Jean Vilar, qu’il avait découverte en assistant aux répétitions du festival d’Avignon. Âgé de 17 ans, Lucien Clergue fut alors très impressionné par sa façon de faire poser les gens. Si cela s'est inscrit dans l'air du temps à cette époque, le film d’Alain Resnais L’année dernière à Marienbad (1961, sur un scénario d’Alain Robbe-Grillet, par ailleurs membre de l’Académie française) en est une des illustrations les plus significatives. Les attitudes figées des personnages fascinaient alors. Cette réminiscence dans son travail 25 ans après à Venise, lui permet de recréer cette ambiance sans raconter une histoire particulière, laissant la porte ouverte au lecteur. La deuxième vision lui vient de son rapport particulier à la peinture. De Van Gogh, qui a séjourné dans sa cité natale, Arles, à Picasso qu’il y a rencontré et dont il est devenu l’ami, aux peintres de Venise qu’il admire, le photographe est, on le sait, un adepte des surimpressions dans son œuvre photographique. Une alliance originale où il associe grande peinture baroque ou autre à ses photographies contemporaines. Est-ce là, dans la cité des Doges, que ce serait imprimée sur sa rétine, puis oubliée pour plusieurs années cette idée des surimpressions ? Les décorations de Lila de Nobili du palais vénitien où il a pris ces photographies l’auraient-elles influencé ?
Pour en savoir plus
- pour acheter Nus vénitiens sur le site des Editions Seghers, cliquez sur ce lien.
- Lucien Clergue sur le site Internet de l'Académie de beaux-arts dont il est membre élu depuis 2006, au premier fauteuil de la section de photographie.
- Lucien Clergue sur Canal Académies, parmi toutes les émissions avec le photographe :
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